Par Dimitri AGBOZOH-GUIDIH
Depuis la fin de la colonisation, l’Afrique se trouve au cœur d’un débat complexe : celui de la souveraineté des États et de l’autodétermination des peuples. Si l’indépendance politique acquise au cours du XXe siècle a marqué un tournant majeur, les défis actuels, allant de l’ingérence étrangère à la fragmentation interne, posent la question de savoir si cette souveraineté et cette autodétermination sont pleinement effectives ou si elles demeurent une utopie.
Un héritage colonial pesant
L’histoire coloniale de l’Afrique a laissé un lourd héritage. Les frontières artificielles tracées par les puissances coloniales ont souvent ignoré les réalités ethniques, linguistiques et culturelles locales. Cela a engendré des tensions internes, alimentant des conflits et des divisions qui entravent aujourd’hui encore la pleine autonomie des États africains.
En outre, malgré les proclamations d’indépendance, de nombreux pays africains restent économiquement dépendants de leurs anciens colonisateurs. Les accords de coopération signés au moment des indépendances ont souvent maintenu une influence étrangère sur les secteurs stratégiques, comme les ressources naturelles ou les infrastructures.
Les défis de la souveraineté dans un monde globalisé
Dans un contexte de mondialisation, la souveraineté des États africains est mise à l’épreuve par divers acteurs. Les grandes puissances économiques, notamment à travers des institutions financières internationales comme le FMI ou la Banque mondiale, imposent souvent des politiques économiques qui limitent la marge de manœuvre des gouvernements locaux.
Par ailleurs, l’ingérence étrangère, qu’elle soit militaire, politique ou économique, reste une réalité. Des exemples récents incluent la présence de bases militaires étrangères sur le continent ou encore des contrats miniers inégaux, souvent conclus au détriment des populations locales.
L’autodétermination des peuples : une quête inachevée
Si la souveraineté des États semble fragile, celle des peuples africains l’est encore davantage. Les revendications d’autonomie ou d’indépendance de certaines régions, comme la région du Biafra au Nigéria ou les aspirations du peuple sahraoui, montrent que de nombreux Africains se sentent exclus des décisions prises par leurs gouvernements.
De plus, les élites au pouvoir sont parfois accusées de perpétuer des systèmes d’oppression hérités de la colonisation, en marginalisant certaines communautés ou en accaparant les ressources au profit de quelques-uns.
Une résistance et des initiatives locales porteuses d’espoir
Cependant, tout n’est pas sombre. De nombreux peuples africains s’organisent pour défendre leur autodétermination et leur souveraineté. Les mouvements panafricanistes, les initiatives communautaires et l’émergence de nouvelles générations de leaders plus sensibles aux aspirations populaires témoignent d’une volonté de reprendre en main le destin du continent.
L’Union africaine, bien qu’imparfaite, joue un rôle croissant dans la résolution des conflits et la promotion de solutions africaines aux défis africains. De même, les projets d’intégration régionale, tels que la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF), montrent une volonté de renforcer l’indépendance économique et politique du continent.
La souveraineté des États et l’autodétermination des peuples africains oscillent entre une réalité fragile et une utopie tenace. Si les obstacles sont nombreux, notamment en raison de l’ingérence étrangère et des divisions internes, les dynamiques actuelles laissent entrevoir des perspectives encourageantes. L’avenir de cette quête repose sur la capacité des Africains à redéfinir leurs priorités, à renforcer leurs institutions et à s’unir pour construire un continent réellement souverain et autonome.