Par Massaër DIA
L’ONG Lumière Synergie pour le Développement (LSD) avec le soutien de Both ENDS, a organisé ce samedi 06 avril 2024 un atelier de stratégie avec les impactés de la phase 1 du projet Train Express Régional. 7 ans après, ils continuent toujours à réclamer 50 milliards d’indemnisation à l’Etat du Sénégal.
M. Ibrahima Cissé, coordonnateur du collectif des impactés du TER, porteur du recours du mécanisme indépendant du recours de la BAD, estime que cela fait 7 ans qu’ils sont en bras de fer avec l’Etat du Sénégal.
« Cela date de 2016 à nos jours, cela fait 7 ans que nous sommes en bras de fer avec l’Etat du Sénégal qui a exproprié nos biens illégalement. Depuis tout ce temps, nous, qui étions pères de famille, avons des ménages, des entreprises, nous sommes retrouvés dans la dèche totale. Nos biens ont été confisqués, illégalement puisque les normes d’expropriation foncière telle que définie par la loi sénégalaise, n’ont pas été respectées et de même que les textes de la BAD n’ont pas été respectés, ce qui fait qu’ aujourd’hui, il y a plus de 70 entreprises formelles qui ont été fermées et qui ont déjà déposé leur bilan depuis 2018 jusqu’à présent, n’ont pas été indemnisés, de même, il y a plus de 200 et quelques détenteurs de titres de dossier. Certains avaient des 1000 mètres carrés, 2000 mètres carrés, à ce jour, ils ont fait leur conciliation et ils n’ont touché aucun Franc pour l’indemnisation de leurs titres fonciers », a souligné M. Ibrahima Cissé.
Il poursuit : « Nous interpellons le Président de la République le nouveau Président en ce sens de passer à une reddition des comptes puisque la BAD a fait tout ce qu’elle devait faire, c’est-à-dire tout le financement de la phase 1 a été décaissé aussi bien l’AFD que la BAD et jusqu’à présent l’Etat nous doit plus de 50 milliards puisque par nous, il y a des experts à l’expropriation, on a estimé ça. L’Etat nous doit plus de 50 milliards, nous les impactés, porteurs du recours et nous avons des pièces qui ont une valeur juridique. C’est la BAD qui nous donne raison et c’est attesté par un plan d’action de correction et une décision de la banque, c’est assez clair. Donc, nous interpellons le Président et l’invitons à venir à notre rescousse puisque nous sommes hyper-fatigués. Depuis 7 ans, jour pour jour, nous sommes en location et on nous fait sortir des maisons, nos enfants ne vont plus à l’école et nous avons perdu notre travail. L’argent destiné aux impactés, nous ne l’avons pas reçu ».
112 millions de dollars aujourd’hui bloqués par la BAD
M. Babacar Diouf, spécialiste en suivi Projet-Infrastructure financé par la Banque africaine de Développement (BAD) au sein de l’Ong Lumière synergie pour le développement (LSD), souligne : « Nous, au niveau de LSD, nous faisons le monitoring des politiques et des opérations des banques ici en Afrique de l’Ouest. Et le cas du Train Express Régional est très illustratif parce que depuis 2016, ce projet a affecté plus 2000 familles sur le tronçon Dakar-Diamniadio et suite à une plainte en 2019, la Banque africaine de développement a tenu à organiser une médiation pendant plus d’une année entre les parties prenantes malheureusement l’APIX, l’entité de mise en œuvre du projet s’est retiré du processus, c’est à l’issu de cela que la Banque africaine de Développement a commandité une vérification de conformité du projet Train Express Régional par rapport à ses politiques de sauvegarde environnementales et sociales ».
D’après M. Diouf, le rapport a été rendu public en janvier 2023 et dans ce rapport, la Banque Africaine de Développement a reconnu que le Train Express Régional est très utile aux sénégalais sur le tronçon Dakar- Diamniadio, c’est au prix de sacrifice des personnes affectées qui ont perdu leur logement, qui ont perdu leurs moyens de subsistance et qui vivent dans un stress syntagmatique et pour résoudre le problème, la BAD a mis en œuvre un plan d’action pour corriger ces non-conformités et ce plan d’action a été adossé par un plan d’action de l’emprunteur qui est ici le gouvernement du Sénégal mais jusqu’ici.
« Les actions ne sont suivies sans aucun effet. C’est dans ce sens que la BAD qui a été sollicitée par l’Etat du Sénégal pour financer la deuxième phase du projet, a décidé de conditionner le financement de la deuxième phase du projet avec le règlement de tous les problèmes qui ont été notés sur la première phase du projet allant de Dakar à Diamniadio et cela représente un montant quand même important parce que c’est plus 75 millions d’unités de compte qui représentent environ plus de 112 millions de dollars qui sont aujourd’hui bloqués par la banque du simple fait que l’Etat du Sénégal n’a pas respecté les sauvegardes environnementales et sociales de la BAD », martèle M. Diouf
M. Diouf estime qu’en tant que ONG qui suit l’institution financière panafricaine, ils pensent que cela représente un risque réputationnel très énorme pour l’Etat du Sénégal.
Il conclut : « Je pense que si la Banque va jusqu’à bloquer ces financements du fait que l’Etat a failli à ses obligations, cela représente un risque réputationnelles nouvelles autorités du Sénégal doivent vite régler, parce que nous, au niveau de l’ONG, on est rattaché à la redevabilité et au sauvegarde environnementale et sociale. Aujourd’hui, est que la BAD aille plus loin sur le continent que la banque parvient à exclure de son portefeuille les Etats qui ne respectent pas ces sauvegardes environnementales et sociales ainsi que ses politiques de redevabilité, c’est en ce sens que nous invitons les nouvelles autorités à se pencher le plus rapidement possible sur le cas Train Express Régional pour retrouver au moins sa confiance bénéficiaire, sa confiance des administrateurs de la banque. Si l’Etat ne réagit pas vite, ne corrige pas les manquements comme l’exige la banque africaine de développement, la BAD ne va pas participer au financement de la deuxième phase du projet et étant la première institution de financement du développement en Afrique, je pense que cela constituerait un précédent dangereux ».
Mme Fatou Dione, coordonnatrice des personnes affectées par le TER du département de Dakar estime que depuis 2016, ils sont confrontés à des situations très difficiles à cause du TER. Et le projet a causé des dommages à plus de 30 000 personnes et a créée des sans-abris.
2000 familles affectées par le projet à Dakar et sa banlieue
« Le projet Train Express (TER)1, une infrastructure visant à accroître la mobilité dans la région de Dakar en est l’illustration parfaite. Il a engendré le déplacement de 14465 PAP2 et affecté négativement près de 2000 familles dans le Département de Dakar et sa banlieue. Or, la BAD et l’AFD, principaux bailleurs du projet, disposent de politiques de sauvegardes environnementales et sociales destinées à protéger les populations riveraines de ses projets. Cependant, ces derniers ont failli à leurs responsabilités et n’ont pas pu faire respecter leurs propres politiques. Et en résultante, plus de 2 000 personnes et de milliers de familles n’ont pas été correctement installées ce qui accroît le risque d’une paupérisation des Personnes affectées par le Projet (PAPs) », précise-t-on dans les TDR.