Togo/Interview Exclusive: Péyébinesso LIMAZIE(ONAT): ‘‘nous ne sommes pas en conflit avec les ingénieurs’’
Par la rédaction
Vendredi 27 juin 2024, Péyébinesso LIMAZIE rempilait pour un nouveau mandat de 3 ans à la tête du Conseil Supérieur de l’Ordre National des Architectes du Togo(ONAT). Loin du triomphalisme, le Président veut mettre ce nouveau mandat sous le sceau du professionnalisme des artisans de l’acte de bâtir. Il a accordé une interview à Plume d’Afrique dans laquelle il est largement revenu sur ses principaux chantiers et la relation entre ingénieurs et architectes.
Plume D’Afrique(PDA) : Bonjour Président. Un nouveau mandat, quels défis ?
Péyébinesso LIMAZIE(PL): Bonjour!D’abord, je voudrais préciser que le nouveau mandat prend effet au 1er janvier. Nous avons voulu arrimer notre ordre aux activités politiques et économiques de notre pays.
Donc l’année commence le 1er janvier. C’est pour cela nous avons voulu, à la chute du mandat, que nous puissions faire une élection qui permette au nouveau bureau de prendre effectivement place au 1er janvier de l’année. Et les défis sont nombreux.
Comme vous l’avez suivi avec nous, et comme vous le savez, l’activité de l’ordre est une activité publique. Et nous devons arrimer donc notre mandat et les mandats qui viennent sur la pertinence de la présence de l’architecte et de l’architecture dans la société.
Autant les gens disent, bon voilà, j’ai fait ma maison, je n’ai pas eu besoin de l’architecte et tout ça. Mais dès qu’il y a une question d’inondation, on pense à l’architecte. Donc, nous, notre rôle au niveau de l’ordre des architectes, c’est d’apporter notre appui.
PDA : Est-ce que l’architecture nourrit son homme ?
PL : Techniquement, aujourd’hui, nous avons plein d’architectes qui ne peuvent pas vivre de leur métier, du fait même que la dévolution des marchés publics n’est pas orientée vers les architectes. Et il nous faut corriger cela, parce que c’est une perte majeure. Avoir de la qualité de la réflexion qui n’a pas été utilisée, c’est une perte pour tout le monde, pour notre société et pour notre pays.
Et il faut aussi que les architectes se rendent disponibles. Tout à l’heure, vous avez entendu dans nos débats, que des gens sont en mesure de facturer leurs prestations plus que les architectes. Alors qu’en réalité, ce sont des prestations que nous faisons sur des longueurs d’années, et même gratuitement.
Mais personne ne nous les a reconnues. Il nous faut vraiment commencer par les facturer, pour que les gens sentent que toute prestation intellectuelle a un coût. Parce que nous faisons d’abord une prestation intellectuelle, et derrière cela, que nous puissions être en mesure d’accompagner des gens avec les assurances et avec les documents techniques nécessaires pour que nos populations soient rassurées, dans un premier temps.
Mais également, qu’elles puissent bénéficier de la meilleure qualité de construction. Si vous-même, vous faites votre clôture, votre maison, sans avoir recours à l’expertise et à la beauté nécessaire, ne venez pas dire que le boulevard n’est pas beau.
Alors que vous auriez pu contribuer à ce que votre bâtiment, votre immeuble, votre environnement, soit une référence dans la ville dans laquelle vous habitez.
PDA: Président, entre l’ingénieur et l’architecte qui est plus sollicité dans l’acte de bâtir ?
PL: Nous ne sommes pas en conflit avec les ingénieurs. Nous sommes dans un métier qui dit que la conception d’un bâtiment n’est pas une question strictement d’ingénieurs. Parce que dans un bâtiment, quand vous parlez d’ingénieurs, est-ce que vous estimez que par exemple un ingénieur électricien peut vous concevoir un bâtiment? Non.
Est-ce que vous pensez qu’un ingénieur acousticien peut vous concevoir un bâtiment? Non. Nous disons que dans tout l’art de bâtir un bâtiment, il y a plusieurs compétences.
Et dans ces sens-là, l’architecte, c’est lui qui fait la coordination de tous ces métiers. Vous ne pouvez pas avoir une maison où il n’y a pas d’électricité. Vous ne pouvez pas avoir une maison où vous ne savez pas où se trouvent les interrupteurs.
Vous ne pouvez pas mettre une maison aujourd’hui où vous mettez l’interrupteur derrière la porte. Et donc ça, c’est un art que les architectes connaissent. Ils ont été formés pour ça.
C’est pour ça que nous disons que l’architecte est là pour faire la coordination. Et si vous voyez bien dans le processus de permis de bâtir, dès que nécessaire, l’ingénieur doit intervenir. Et même la loi prévoit que l’ingénieur puisse faire valoir le fait qu’il est inscrit à l’Ordre des ingénieurs.
Ce n’est pas parce qu’on a un ingénieur génie civil qui est un corps de métier de notre maison que ça veut dire que le gars a toutes les aptitudes pour faire ma maison. Et c’est ça que nous voulons que nous partagions ensemble. Il n’y a pas de conflit entre les métiers.
PDA: Quel bilan faites-vous de votre premier mandant à la tête de l’ONAT ?
PL: Le mandat finissant est un mandat où nous avons énormément bénéficié de la collaboration de nos confrères.
Et même aujourd’hui il y a certains de nos confrères qui n’étaient pas dans cette salle, qui étaient sur des ateliers. Donc nous avons pu bénéficier de leur collaboration.
Nous avons eu l’occasion de rencontrer les plus hautes autorités de notre pays, toutes les plus hautes autorités de notre pays, à qui nous avons soumis notre vision, et qui ont accepté d’accompagner cette vision, mais surtout qui ont orienté cette vision-là pour que nous puissions atteindre le bien commun pour notre pays. Il y a des défis qui restent à relever. Il y a deux objectifs que nous n’avons pas atteints, mais il s’agit essentiellement de se mettre toujours au travail en se disant que nous pouvons parfaire les objectifs et que nous pouvons aller davantage plus loin.
PDA : Merci Monsieur le Président
PL : C’est à nous de vous remercier pour tout ce que vous faites pour le rayonnement médiatique de l’ONAT.
Entretien réalisé par Plume d’Afrique