Par Dimitri AGBOZOH-GUIDIH
Dans les sociétés ancestrales, les notions d’éthique et de déontologie n’étaient pas de simples concepts abstraits, mais des piliers fondamentaux de la vie collective. Ces valeurs, inscrites dans les coutumes, les rites et les récits, servaient de guide pour maintenir l’ordre, assurer l’équité et préserver l’harmonie sociale.
Bien avant l’apparition des chartes modernes, les communautés ancestrales vivaient selon des codes de conduite tacites mais puissants. L’éthique orientait les comportements individuels vers le bien commun, tandis que la déontologie définissait les responsabilités précises de chaque rôle au sein de la société – qu’il s’agisse du chef, du guérisseur, du forgeron ou de l’enseignant spirituel. Aujourd’hui, alors que nos sociétés modernes sont souvent marquées par des crises de valeurs, il est pertinent de revisiter ces modèles ancestraux.
Éthique : une responsabilité collective
L’éthique en milieu ancestral reposait sur une conviction forte : chaque individu est responsable de ses actes envers sa communauté et son environnement. Le respect de la parole donnée, la solidarité et l’intégrité étaient des vertus centrales. Toute transgression de ces principes entraînait des sanctions, non pour punir, mais pour rétablir l’équilibre social.
Par exemple, dans plusieurs cultures africaines ou amérindiennes, un acte jugé égoïste ou contraire à l’intérêt collectif pouvait être corrigé par un rituel de réconciliation. Ces pratiques mettaient en lumière l’importance du dialogue et du pardon comme outils éthiques pour renforcer les liens sociaux.
Déontologie : Le respect du rôle et de la fonction
En milieu ancestral, chaque membre de la communauté avait un rôle bien défini, accompagné d’un ensemble de devoirs spécifiques. Le chef devait garantir la justice et la paix, le guérisseur devait soigner sans discrimination, et le sage avait pour mission d’éclairer les plus jeunes. La déontologie régissait ces fonctions, établissant des limites claires pour éviter les abus de pouvoir ou les conflits d’intérêts.
Ce respect des fonctions était renforcé par des rituels d’investiture, où la communauté rappelait publiquement les devoirs de chacun. Ainsi, la déontologie n’était pas seulement une affaire individuelle, mais une règle collective qui protégeait l’harmonie et la stabilité du groupe.
Un modèle inspirant pour aujourd’hui
Face à la montée des scandales liés au non-respect de l’éthique et de la déontologie dans les sphères politiques, économiques ou professionnelles, les enseignements issus des sociétés ancestrales offrent une perspective inspirante. Voici quelques leçons que nous pourrions intégrer dans nos pratiques contemporaines :
La transparence communautaire : Les décisions majeures en milieu ancestral étaient souvent prises en conseil, avec une participation collective. Cela garantit une transparence qui fait cruellement défaut dans certaines de nos institutions modernes.
L’équilibre entre droits et devoirs : Là où nos sociétés mettent souvent l’accent sur les droits individuels, les sociétés ancestrales insistaient tout autant sur les devoirs envers la collectivité. Cet équilibre est essentiel pour éviter les dérives éthiques.
L’importance des sanctions réparatrices : Plutôt que de se limiter à punir, les systèmes ancestraux privilégiaient la réparation et la réconciliation. Une approche qui pourrait enrichir nos conceptions actuelles de la justice.
Préserver et transmettre ces valeurs
Pour que ces valeurs ne se perdent pas dans les méandres de la modernité, il est crucial de les documenter et de les transmettre aux générations futures. Cela passe par la valorisation des traditions orales, la réhabilitation des conseils communautaires et l’intégration de ces concepts dans l’éducation.
En s’inspirant de l’éthique et de la déontologie en milieu ancestral, nos sociétés modernes peuvent redécouvrir des principes intemporels, adaptés aux enjeux actuels. Loin d’être dépassées, ces valeurs ancestrales incarnent une sagesse universelle, capable de guider les hommes vers une coexistence plus juste et harmonieuse.
Dans un monde en quête de repères, il est temps de se tourner vers ces leçons oubliées pour réconcilier modernité et héritage.